Qu’est-ce que le surentraînement ?
Le triathlon est une passion, souvent dévorante. En règle générale, les triathletes se prennent au jeu de la comparaison des distances et des temps, pour leurs propres performances comme pour celles de leurs concurrents. Toujours plus loin, toujours plus vite. Voilà la devise qui semble prévaloir. Pour de nombreux athlètes, le cyclisme est le moyen par excellence de pousser le volume global d’entraînement. Nombreux sont ceux dont l’objectif est d’atteindre les 20 heures d’entraînement par semaine.
Est-ce raisonnable ?
Il vous arrive parfois d’avoir l’impression de vous être correctement et beaucoup entraîné, mais que les résultats stagnent et même qu’ils régressent. Ce constat vous incite tout naturellement à vous entraîner plus et à avaler encore davantage de kilomètres, sans observer de progrès significatif. Au contraire même, dans de nombreux cas, vos performances continueront à décroître.
Comment est-ce possible ?
Pour répondre à cette question, nous devons analyser la notion d’entraînement. L’entraînement est l’application systématique de stimuli à l’organisme en tenant compte de son seuil de tolérance à l’effort spécifique. Les modifications provoquées par ces stimuli clans l’organisme conduisent à une amélioration des performances, à condition toutefois de doser judicieusement l’équilibre effort récupération. Cette définition comporte plusieurs notions importantes :
Le seuil de tolérance de l’organisme
Le seuil de tolérance est propre à chaque triathlète. La tolérance à l’effort n’est également pas constante. Un manque de repos nocturne, une alimentation inappropriée, la maladie et le stress peuvent réduire le seuil de tolérance de l’organisme. La tolérance à l’effort varie également en fonction des triathlètes. Certains sportifs supportent un volume et une intensité d’entraînement plus importants que d’autres.
Le triathlon est une discipline très éprouvante. Il faut tenir compte des principes d’entraînement des bons triathlètes et les adapter à son propre seuil de tolérance à l’effort. De plus, il serait erroné de croire que le triathlète au seuil de tolérance le plus élevé aligne, de facto, les meilleures performances.
Le surentraînement intervient lorsque les stimuli d’entraînement dépassent le seuil de tolérance individuel. Il convient toutefois de distinguer le surentraînement qualitatif et quantitatif. La cause du surentraînement qualitatif doit être recherchée dans l’intensité des stimuli appliqués durant les séances d’entraînement. Autrement dit, le sportif s’entraîne trop intensément. Le surentraînement quantitatif s’explique, quant à lui, par un volume d’entraînement excessif. Dans ce cas, ce n’est pas l’intensité de l’entraînement, mais bien la durée d’entraînement qui est trop élevée. Il n’est pas rare d’observer une combinaison de ces deux formes de surentraînement.
C’est pourquoi, il importe d’augmenter progressivement l’intensité et le volume de l’entraînement. Au début d’un programme d’entraînement, il faut accorder une importance primordiale à l’augmentation graduelle du volume d’entraînement. On veillera toujours à se constituer une bonne hase d’endurance (endurance aérobie) avant de songer à intensifier les entraînements. Vous devez donc constamment permettre à votre organisme de s’adapter à l’intensité croissante des stimuli d’entraînement. Une augmentation brutale du volume d’entraînement, qu’elle soit qualitative ou quantitative, conduit à terme à une baisse du niveau des performances. A cet instant, la vulnérabilité aux blessures de surentraînement est grande. La prudence est surtout de mise lors de la mise en oeuvre d’un nouveau programme d’entraînement. Même pour Ies triathlètes les mieux entraînés, il existe un équilibre précaire entre l’amélioration des performances et le surentraînement.
Le dosage judicieux effort-récupération
La capacité de performances diminue par le fait même de l’entraînement. A la fin d’une séance, vous êtes fatigué et vous n’êtes plus en état de refaire le même entraînement. Un effet positif de l’entraînement n’est possible qu’après une période de repos suffisante. Ce mécanisme s’appelle le principe de la surcompensation.
Le principe de la surcompensation
Le principe de la surcompensation représente peut-être le principe d’entraînement le plus important pour un triathlète. mais en même temps, il est le plus difficile à appliquer. Selon ce principe, l’effet positif de l’entraînement ne peut se manifester que si l’entraînement est suivi d’une période de récupération suffisamment longue. Si le principe paraît logique, sa mise en application est loin d’être évidente pour un triathlète qui doit se préparer à trois disciplines différentes.
Le schéma suivant explique le principe
P0, PI, P2, P3, P4… différents niveaux des performances.
AB : baisse du niveau des performances suite à la fatigue accumulée durant l’entraînement.
BC : le niveau des performances augmente à nouveau pendant la période de récupération.
CD : la surcompensation, l’effet positif de l’entraînement.
Nous constatons que l’effet d’entraînement optimal ne peut se manifester que si la crête de surcompensation est atteinte. En tant que triathlète, vous vous trouvez confronté à quelques questions fondamentales.
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A quel moment avez-vous suffisamment récupéré pour reprendre l’entraînement (Combien de temps vous faut-il pour arriver à la surcompensation après une séance déterminée ?)
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Quelle peut être l’intensité de l’entraînement suivant ?
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Quelle est l’influence de l’entraînement sur les autres disciplines, sur le temps nécessaire pour arriver à la surcompensation après un entraînement déterminé ?
Le temps qu’il faut pour atteindre la surcompensation est déterminé par une série d’éléments :
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Votre niveau d’entraînement ; Mieux vous vous serez entraîné, plus vite et mieux vous récupérerez de l’entraînement précédent.
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La nature du stimulus d’entraînement : La phase de récupération est fonction de l’intensité du stimulus d’entraînement. Un entraînement vélo de longue durée, à faible cadence, nécessite un temps de récupération moins
long qu’un entraînement intervalle intensif à la course à pied. -
Les entraînements durant la phase de récupération de l’entraînement précédent : Un entraînement d’enduranceest moins éprouvant à effectuer après un entraînement vélo intensif qu’après une course d’endurance de longue durée.
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L’alimentation appropriée : En tant que triathlète, vous sollicitez énormément votre organisme. Vous vous entraînez plusieurs heures par jour, ce qui met votre organisme à rude épreuve. Une alimentation appropriée, complétée par des boissons isotoniques, énergétiques ou de récupération (voir ci-dessus) est essentielle à une phase de récupération optimale.
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Votre état psychique : Il existe un rapport manifeste entre votre condition physique et psychique. Si, pour une raison ou une autre, vous êtes stressé, vous récupérerez plus difficilement des efforts que si vous êtes parfaitement décontracté.
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Un sommeil régulier et normal : La régularité du sommeil joue également un rôle prépondérant. En raison d’une série de processus hormonaux, il est important de se lever et de se coucher en temps opportun. Le taux de testostérone dans le sang (la testostérone est une hormone anabolisante) augmente durant la nuit pour culminer le matin. L’hormone croissance, qui joue un rôle dans le processus de récupération de l’organisme après des efforts conséquents, atteint un pic durant la nuit. Un repos nocturne normal optimalise l’action de cette hormone.
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Un accompagnement médical approprié : En raison des entraînements nombreux et éprouvants, certaines carences peuvent se manifester dans le sang. Un examen sanguin permet de les dépister et de les pallier.
Les indicateurs de la crête de surcompensation sont :
Le sentiment subjectif de l’athlète :
– Si vous êtes fatigué, vous n’aurez certainement pas atteint la crête de surcompensation. Évidemment, une fatigue « normale se manifeste à la suite d’un entraînement éprouvant. Même au terme d’un repos nocturne normal, la fatigue peut subsister et les jambes être lourdes. Dans ce cas, il est insensé de poursuivre le plan d’entraînement. Gardez à l’esprit qu’un organisme fatigué ou malade n’est pas entraînable. Au contraire, si vous continuez à vous entraîner, vous obtiendrez l’effet inverse. Les triathlètes sont généralement des sportifs passionnés. Ils ont souvent du mal à admettre qu’ils sont fatigués.
Les analyses de sang :
– En examinant une série de paramètres tels que le nombre de globules rouges, le taux d’hé.moglobine, l’hématocrite (le pourcentage du volume de globules rouges par rapport au volume total de plasma) etc., le médecin peut vérifier si votre entraînement ne porte pas préjudice à votre organisme. Ces analyses sont cependant relativement onéreuses et elles ne peuvent s’effectuer que quelques fois par an.
Les tests submaximaux ou maximaux :
– Le niveau des performances durant ces tests, associé à d’autres paramètres comme l’évolution de la fréquence cardiaque par exemple, peut donner des indications sur le processus de récupération.
La mesure de la fréquence cardiaque durant l’entraînement :
– Si vous avez. l’habitude de vous entraîner avec un cardiofréquencemètre, vous constatez rapidement si la fréquence cardiaque mesurée en cours de séance correspond à votre fréquence cardiaque habituelle, pour ce type d’efforts. Une, augmentation de votre fréquence cardiaque durant l’entraînement peut indiquer que vous n’avez pas encore suffisamment récupéré de l’entraînement précédent.
Une compréhension parfaite de la nature des stimuli d’entraînement effectués :
– Il est conseillé de tenir un journal de bord des entraînements, de manière à comprendre parfaitement la nature des stimuli d’entraînement et de corriger la phase de récupération en cas de fatigue.
Le tableau suivant vous donne une idée du temps de récupération nécessaire en fonction de la nature du stimulus d’entraînement.
Type entraînement | à effet aérobie | aérobie anaérobie 85%-95% | anaérobie 95%-100% | Force | |
Récupération | |||||
Durant l’effort | Intensité 60-70% | ||||
Récupération immédiate mais incomplète | après 1 h 30 à 2H | après ± 2 h | après ± 2 h | ||
90-95% de récupération | Intensité 75-80 %
après 12 h |
après ± 12 h | après ± 12 h – 18 h | après ± 18 h | |
100% récupération – complète | Intensité 75-80 %
après 24 à 36 h |
après 24 à 48 h | après 48 à 72 h | après 72 à 84 h |
L’examen de ce tableau vous permet de constater qu’après un entraînement intensif anaérobie, vous devez attendre trois jours avant de pouvoir supporter une même charge d’entraînement. Il ne faudrait pas en conclure que vous ne pouvez pas vous entraîner durant la phase de récupération subséquente à un entraînement intensif. Faites suivre un entraînement très intensif (répétition d’efforts anaérobie) d’un entraînement de récupération. Après un entraînement intensif plus modéré, vous pouvez, sans aucun problème, faire un entraînement d’endurance à faible allure dans une autre discipline. Cet entraînement devrait à son tour être suivi d’un décrassage (récupération relative).
Il tombe dès lors sous le sens que le travail d’entraînement ne sera bénéfique que si l’entraînement est suivi d’une période de récupération (relative) suffisante, afin d’arriver à la surcompensation et de constater dès lors les conséquences positives de l’entraînement (c’est-à-dire une augmentation des performances). Les effets d’une phase de récupération trop brève après l’entraînement sont mis en évidence par le schéma suivant :
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P0, Pi, P2, P3, P4 les différents niveaux des performances.
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AB : une baisse du niveau des performances suite à la fatigue accumulée durant les entraînements.
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BC : le niveau des performances n’augmente pas suffisamment, parce que la phase de récupération a été trop brève.
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Au point C, la nouvelle séance d’entraînement a été programmée trop vite. Au lieu d’observer une augmentation du niveau des performances, nous observons manifestement une baisse.